Objet du mois

Hermann Hesse, une voie d’inspiration pour Anise Koltz

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« Dank u. Gruss von Ihrem H Hesse ». Très sollicité par ses nombreux lecteurs, Hermann Hesse avait l’habitude de leur répondre le plus souvent par des tirés à part d’articles divers, de poèmes ou d’extraits de lettres remarquables, auxquels il apposait cette formule de remerciement au stylo à encre. Ce type de courrier, le fonds d’Anise Koltz en compte une quinzaine s’étalant de 1955 à 1959. C’est dire que la jeune Anise Koltz, proche de la trentaine, entretenait une correspondance régulière avec son aîné, né en 1877. Plus particulièrement, le fonds recèle l’aquarelle ci-exposée – Hesse aurait peint plus de 4000 aquarelles de la région du Tessin - ainsi qu’une lettre dactylographiée de l’écrivain datant du 11-12 septembre 1955 dans laquelle il répond patiemment, avec malice et sensibilité, aux critiques d’Anise Koltz à l’égard de son roman Glasperlenspiel (1943).

Grâce à ces lettres, nous pouvons supposer que la jeune Anise Koltz devait sans cesse, avec ferveur, commenter son œuvre et s’en imprégner. Hesse a indéniablement contribué à former le goût littéraire de la poétesse en devenir. Relevons brièvement quelques aspects.

Les contes qu’Anise Koltz a publiés en 1953 (Die Blumenwiese …), en 1957 (Märchen), et en 1960 (Der Wolkenschimmel…) présentent des ressemblances étonnantes avec ceux de Hesse comme, par exemple Der Dichter (1912) ou Iris (1918). Chez les deux auteurs se profile en effet le thème de l’enthousiasme et de l’émerveillement devant la beauté de l’infiniment fragile et de l’infiniment grand. Le cheminement en soi, qui est le véritable destin de tout grand écrivain, est clairement abordé dans le conte Iris sous le registre du merveilleux : Anselm, le héros de ce conte, aimait, enfant, contempler longuement l’intérieur des iris: « und [er] blickte lange hinein, und sah die gelben feinen Glierder (…) bald als doppelten Gang von schönen Traumbäumen (…), und zwischen ihnen lief hell und von glaszarten lebendigen Adern durchzogen der geheimnisvolle Weg ins Innere ». Anise Koltz y répond à sa manière en réécrivant le titre d’un recueil de contes d’Hermann Hesse, de 1931: Weg nach innen devient Spuren nach innen, titre de son deuxième recueil de poèmes, qu’elle publiera en 1960. C’est bien dans ce recueil qu’Anise Koltz abandonne définitivement la thématique romantique encore très présente dans son premier recueil Gedichte (1959), thématique très proche des poèmes même de Hesse, pour se lancer dans sa propre quête des voies intérieures. Ses activités littéraires, à la même époque, prennent de l’ampleur. Elle collabore, avec Rolph Ketter, à la jeune revue plurilingue luxembourgeoise, Jeune poésie européenne, que Suzel Etienne dirige et pour laquelle Hesse offre, sans doute sollicité par sa lectrice assidue, un poème inédit et une photo de lui en guise de soutien pour le n°4 d’avril 1960. Deux ans plus tard, Anise Koltz convoquera les premières Journées littéraires de Mondorf, début d’une aventure qui contribuera à donner à la littérature luxembourgeoise ses lettres de noblesse.

Légende :

- Aquarelle de Hermann Hesse, vue sur un village et le lac de Lugano, dédicacée et signée par l’auteur, format carte postale. Reproduction d’une aquarelle illustrant la première de couverture de l’ouvrage Hesse / ROLLAND, Briefe, Fretz & Wasmuth Verlag AG. Zürich, 1954. La végétation méditerranéenne au Tessin est fort marquée, entre autres, par des palmiers et des cyprès.

- Lettre dactylographiée de Hermann Hesse à Anise Koltz, sous enveloppe, 18 x 14,4cm, signée au crayon, avec cachet de l’auteur (nom, village, région, pays), cote CNL : L-0042 ; II.2.H24-01. Cette réponse a été retenue et publiée par Suhrkamp, en 1986, dans Hermann Hesse, Gesammelte Briefe, Viertes Band, 1949-1962, p. 247-248.

 

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